Je ne l'ai pas mentionné dans mon texte de la semaine dernière, mais j'ai reçu la « lettre du regret » de la SODEC un peu avant de publier mon dernier blog. C'est seulement hier que j'avais le droit d'appeler pour qu'on m'explique les raisons du refus. Inquiétez-vous pas, je ne me mettrai pas à chier sur nos institutions gouvernementales qui ont de la difficulté à financer la culture (je n'ai pas de nouveaux points à apporter au débat, et je crois que nous connaissons tous les enjeux).
On peut bien se plaindre, mais comme dans bien des domaines de la société québécoise, le seul intervenant qui investit dans des champs à risque, c'est le gouvernement. Les hommes d'affaires se spécialisent généralement dans le commerce de détail (pharmacies, dépanneurs, supermarchés…). En fait, on laisse le gouvernement prendre des chances avec l'argent commun, et si jamais l'entreprise est un succès, on se plaint qu'il vient nous reprendre les fruits de la récolte (impôts, taxes, redevances, etc), avant de lui faire payer pour les emplois générés par « l'entreprise privée » .
Le cinéma est une buisness des plus épeurantes pour les investisseurs privés, étant donné qu'on ne peut pas déterminer à l'avance avec certitude quel sera le résultat. Quel amalgame de facteurs nous donnera instantanément un succès ? Si on ne met que des têtes d'affiche, qu'on suit la recette du scénario classique et qu'on investit généreusement dans la mise en marché, ne devrions-nous pas obtenir nécessairement un blockbuster ? Eh bien non (je n'ai malheureusement pas réussi à remettre la main sur cette étude de probabilité qui avait été fait pour le compte du gouvernement britannique).
En fait, j'ai l'impression que le seul endroit au monde où cette recette fonctionne assez bien (grands noms, scénario classique et pub), c'est ici. Nous n'avons qu'à penser à Un homme et son péché, Aurore, Bon Cop Bad Cop, Ma Vie en cinémascope, ou plus récemment, Nitro. Voilà tous des films de producteurs (je ne suis pas certain pour Nitro, semblerait qu'Alain Desrochers aurait enfanté l'idée originale…) qui avaient comme objectif avoué de fracasser le box-office. Vous me demanderez quel film ne vise pas cet objectif, et je vous dirai que personne ne crache sur le succès. Par contre, je ne suis pas certain que l'objectif financier soit dans la tête de tous les créateurs. Quand je pense aux grands films, ceux qui ont profondément changé l'art cinématographique et qui continuent, souvent plusieurs décennies après leur parution, à influencer le cinéma actuel, je ne vois pas nécessairement de films qui ont brisé des records d'assistance en salle.
Ironiquement, aucun des films mentionnés plus haut n'ont percé significativement les marchés à l'extérieur de la province. Ce sont souvent des films plus risqués qui réussissent à mieux s'imposer à l'extérieur de notre petit chez-nous. Reste à voir si nos blockbusters passeront l'épreuve du temps...
Je pense que les principes du développement durable devraient s'appliquer à la culture. Il faut avoir en tête de faire des films qui passeront à l'histoire plutôt que des succès instantanés qui perdent leur saveur avec l'âge.
Enfin… Malgré tout ça, mon écriture se poursuit. Je vais me passer de la SODEC pour l'instant, mais je garde en tête le prochain dépôt, au mois de novembre… je vous en reparlerai en janvier 2008, quand ma bourse de Téléfilm Canada sera complètement épuisée et que je ferai à nouveau de l'insomnie en attendant une autre lettre.
Crayon non durable...
jeudi 23 août 2007
La lettre du regret
Fabulé par Alex à 23:23
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