jeudi 23 août 2007

La lettre du regret

Je ne l'ai pas mentionné dans mon texte de la semaine dernière, mais j'ai reçu la « lettre du regret » de la SODEC un peu avant de publier mon dernier blog. C'est seulement hier que j'avais le droit d'appeler pour qu'on m'explique les raisons du refus. Inquiétez-vous pas, je ne me mettrai pas à chier sur nos institutions gouvernementales qui ont de la difficulté à financer la culture (je n'ai pas de nouveaux points à apporter au débat, et je crois que nous connaissons tous les enjeux).

On peut bien se plaindre, mais comme dans bien des domaines de la société québécoise, le seul intervenant qui investit dans des champs à risque, c'est le gouvernement. Les hommes d'affaires se spécialisent généralement dans le commerce de détail (pharmacies, dépanneurs, supermarchés…). En fait, on laisse le gouvernement prendre des chances avec l'argent commun, et si jamais l'entreprise est un succès, on se plaint qu'il vient nous reprendre les fruits de la récolte (impôts, taxes, redevances, etc), avant de lui faire payer pour les emplois générés par « l'entreprise privée » .

Le cinéma est une buisness des plus épeurantes pour les investisseurs privés, étant donné qu'on ne peut pas déterminer à l'avance avec certitude quel sera le résultat. Quel amalgame de facteurs nous donnera instantanément un succès ? Si on ne met que des têtes d'affiche, qu'on suit la recette du scénario classique et qu'on investit généreusement dans la mise en marché, ne devrions-nous pas obtenir nécessairement un blockbuster ? Eh bien non (je n'ai malheureusement pas réussi à remettre la main sur cette étude de probabilité qui avait été fait pour le compte du gouvernement britannique).

En fait, j'ai l'impression que le seul endroit au monde où cette recette fonctionne assez bien (grands noms, scénario classique et pub), c'est ici. Nous n'avons qu'à penser à Un homme et son péché, Aurore, Bon Cop Bad Cop, Ma Vie en cinémascope, ou plus récemment, Nitro. Voilà tous des films de producteurs (je ne suis pas certain pour Nitro, semblerait qu'Alain Desrochers aurait enfanté l'idée originale…) qui avaient comme objectif avoué de fracasser le box-office. Vous me demanderez quel film ne vise pas cet objectif, et je vous dirai que personne ne crache sur le succès. Par contre, je ne suis pas certain que l'objectif financier soit dans la tête de tous les créateurs. Quand je pense aux grands films, ceux qui ont profondément changé l'art cinématographique et qui continuent, souvent plusieurs décennies après leur parution, à influencer le cinéma actuel, je ne vois pas nécessairement de films qui ont brisé des records d'assistance en salle.

Ironiquement, aucun des films mentionnés plus haut n'ont percé significativement les marchés à l'extérieur de la province. Ce sont souvent des films plus risqués qui réussissent à mieux s'imposer à l'extérieur de notre petit chez-nous. Reste à voir si nos blockbusters passeront l'épreuve du temps...

Je pense que les principes du développement durable devraient s'appliquer à la culture. Il faut avoir en tête de faire des films qui passeront à l'histoire plutôt que des succès instantanés qui perdent leur saveur avec l'âge.

Enfin… Malgré tout ça, mon écriture se poursuit. Je vais me passer de la SODEC pour l'instant, mais je garde en tête le prochain dépôt, au mois de novembre… je vous en reparlerai en janvier 2008, quand ma bourse de Téléfilm Canada sera complètement épuisée et que je ferai à nouveau de l'insomnie en attendant une autre lettre.


Crayon non durable...

mardi 14 août 2007

Oubliez la 5, voici la 6 !



L'écriture de scénario renferme de nombreux rebondissements. Voyez celui-ci : je viens de scraper tout ce que j'avais écrit depuis un mois et je suis reparti de ma chère version 4.3 pour construire ce qui est devenu la version 6.1 du récit.

Je ne scrap pas ça comme ça, pour le fun. C'est qu'en travaillant lundi, c'est-à-dire hier, j'ai été frappé par une idée fantastique qui m'enchante complètement. Attention, je vous explique :

Mon personnage principal (Étienne) était jusqu'ici le centre unique et complet de l'attention. C'est lui qu'on suivait du début à la fin (ça tombe bien, c'est sa vie !). Eh bien voilà qu'après un peu plus de 40 minutes de récit pendant lesquelles on a appris à comprendre et à aimer le grand timide, celui-ci disparaît de la fiction. Le point de vue change complètement pour suivre l'espace d'à peu près 15 minutes les déboires de celle dont il est obsessivement épris.

Wow ! Ça fait tellement du bien ! Je ne vous ferez pas à croire que c'est moi qui ai inventé le changement de point de vue dans un film, mais son utilisation ici me fait vraiment tripper ! J'évite ainsi tout un tas de petites scènes que j'avais parsemées ici et là, de tataouinage scénaristique et de patchage pur et simple pour suivre un personnage jusque là un peu en mal d'incarnation.

Bref, un mois de travail se retrouve à la poubelle, et je me sens plus productif que jamais. Comme quoi il faut parfois reculer un peu pour mieux avancer (n'est-ce pas Monsieur Chaput ?).

Une autre belle phrase à noter dans votre carnet de pensées du jour : À chaque fois qu'une porte se ferme, y'a une fenêtre qui s'ouvre (celle-là est pour mon ami Claude) !


Image d'une écriture enlevante…

jeudi 2 août 2007

C'est pas du travail, ça !

Pour conclure l'épisode de la semaine dernière, disons seulement qu'après avoir passé 4 jours en isolement à Masson, j'ai terminé tout ça par un petit séjour dans la roulotte dont je partage maintenant la propriété avec mes soeurs. Celle-ci se trouve à Val-des-Bois entre les arbres qui meublent les 18 acres de terrain qu'y partagent les Chartrand. Propriété est un bien grand mot, disons que je paie ma part des taxes municipales reliées à la présence de cette épave sur le terrain.



Ça c'est la roulotte en question, dans une petite mise en scène pour un court-métrage du fameux collectif Kick la cam qui n'a jamais été conclu (d'ailleurs, mon avatar MySpace actuel est une prise de l'intérieur de la roulotte provenant de ce même chef-d'oeuvre inachevé !). Voilà en tout cas mon refuge de rêve de la fin de semaine dernière. Résultat de l'isolement : 25 pages griffonnées de nouvelles scènes.

Le problème avec l'écriture, c'est que ce n'est pas considéré comme un véritable travail par ceux qui nous regardent travailler. Comme je suis à la maison (de retour à Montréal), et que je passe mon temps à tripoter un crayon, ça ne donne pas vraiment l'impression qu'il se passe vraiment quelque chose. C'est peut-être moi qui est sensible, mais je me fais constamment déranger pour des petites besognes qui finissent par bouffer tout mon temps.

Résultat : jeudi après-midi, 17h, et j'en suis toujours au paragraphe qui met en scène un nouveau personnage créé à Val-des-Bois la semaine dernière, le Colonel Chasseur. Celui-ci est un vieux Français d'un peu plus de 80 ans qui a fait la guerre et qui s'est réfugié au Québec il y plusieurs années. Il a fait fortune grâce à la commercialisation d'un jeu de société. Je ne vous en dirai pas beaucoup plus sur lui, parce qu'il pourrait révéler une trop grande portion de mon intrigue que je tiens à garder encore un peu pour moi. Je dois toutefois préciser que le Colonel n'est qu'un personnage de second plan dans l'échafaudage de la comédie absurde qu'est Immersion.

Bien que je chiale contre la semaine de misère que je viens de vivre, j'ai quand même mis ensemble une ligne temporelle qui rassemble tous les éléments du récit pour en avoir une vue complète en un coup d'oeil. Exercice réussi. Mon histoire a maintenant un début, un milieu et une fin, ainsi qu'un but précis : atteindre la conclusion (Wow ! Que de révélations ! Attention, je pourrais en dire trop !)

Mon remaniement diégétique s'est donc conclu aujourd'hui. Je suis prêt à passer aux choses sérieuses : le scène à scène.