jeudi 29 novembre 2007

Où est la fin ?

« Les flocons gros comme des peaux de lièvres suspendus entre le ciel et un sol déjà moelleux empêchent non seulement à mon regard d’atteindre l’orée de la forêt, mais également à mes oreilles de percevoir autre chose que mes pieds croquant au delà des chevilles dans les dunes blanches accumulées entre les racines. Heureusement que la nuit est claire, et que la lune se fait sentir, transpirante, entre deux nappes de nuages gonflés. Le foyer n’est plus qu’à quelques enjambées, difficilement reconnaissable, comme un monolithe enseveli. (…) »

Bref, me revoici à Val-des-Bois, cette fois dans un blizzard. Je me suis fait un petit feu au foyer hier soir, pour profiter un peu de l’ambiance. J’ai bu ma bière, isolé de l’obscurité par un périmètre aux teintes orangées. Quand le soleil se couche à ce temps-ci de l’année, on se sent tout seul longtemps. Un silence brisé seulement par des branches qui tombent ici et là dans la forêt, à cause de la neige et du froid. Une noirceur adoucie par la puissance de la lune. Nos yeux s’y habituent. Nos oreilles aussi. Demeure le sentiment de solitude.



La différence entre l’été et l’hiver est marquante par ici. Les chalets qui bordent la rivière sont inoccupés à ce temps-ci de l’année. Je suis au milieu de la forêt, sans téléphone (pensez même pas à Internet !), sans ondes cellulaires, sans eau courante, dans un petit shack de deux pièces chauffé par un poêle à gaz. Avec une bécosse dans un fort en neige qui ferait tripper n’importe quel flo (le fort en neige je parle, pas la bécosse…).



Voulez savoir où j’en suis ? Si vous lisez toujours, je prends ça comme un « OUI ! ».

Comme vous l’aurez compris, je suis présentement au milieu d’une de mes escapades mensuelles. Objectif fixé : compléter le meilleur scénario de tous les temps. Je ne suis pas prétentieux, mais j’avoue que je suis exigeant. Si, quand j’ai fini de l’écrire, je vous dis que c’est le meilleur scénario de tous les temps, vous pourrez me dire que je suis prétentieux. Pour l’instant, je me fixe un objectif.

Le problème quand on est exigeant, c’est qu’on réussit rarement à combler les exigences. Je suis maintenant à la version 7.3 de mon récit, et je n’ai toujours pas (en date de jeudi, le 29 novembre 2007) de fin à mon histoire !!! Pouvez-vous croire à ça ? En écriture depuis juillet le gars ! À temps plein ! Qu’est-ce tu fais ? Le deadline s’en vient à 100 miles à l’heure ! Ou plutôt, c’est moi qui fonce à 100 miles à l’heure vers un mur de béton qui m’attend, sans bouger : janvier !

Je me suis même payé un laptop flambant neuf dans l’espoir que ça me donne le petit boost qui manque pour que je flippe « over the top ». L’effet « petit cahier neuf » multiplié par dix. Faut croire que ça ne marche pas avec les laptops. Le feeling n’est pas le même quand on enfonce des touches, même si elles sont toutes neuves et toutes propres. Mais je n’avais plus beaucoup le choix. Mon texte a maintenant plus de 60 pages, et le petit cahier où je gribouillais à la main les changements à apporter à un paragraphe était fini. Ça devenait aussi une technique de plus en plus mélangeante. Et mon texte n’ira pas en raccourcissant…

Donc : rencontre avec Ken Scott la semaine dernière. Toujours aussi inspirant, toujours des commentaires justes, toujours capable de mettre le doigt sur le bobo. J’ai scrapé la fin du scénario pour la quatrième fois depuis juillet. Ça fait une moyenne de 0,8 fois par mois. Bravo ! On lâche pas, on se creuse le jello, et on continue.

Je dramatise un peu… Je l’avoue. Je veux que vous vous disiez : « Pauvre de lui! » « Va-t-il y arriver ? ». Mais dans le fond, mon scénario n’a fait que s’améliorer depuis le début (les premières 45 pages de l’histoire). Et comme il était déjà très bon à la base, il est maintenant presque devenu le meilleur scénario de tous les temps. Il lui manque juste une petite fin à la hauteur du reste. Prétentieux !